vendredi 13 août 2010

La plume majestueuse d'Edith Wharton

"Etait-ce l'amour, se demandait-elle, ou simplement une combinaison accidentelle de pensées et de sensations heureuses ?"..."Il est moins mortifiant de se croire impopulaire qu'insignifiant, et notre vanité préfère voir dans l'indifférence une forme latente d'inimitié"... "Mais l'idéaliste quand il est soumis à de vulgaires nécessités, doit employer des esprits vulgaires pour tirer des conclusions auxquelles il ne peut s'abaisser en personne..."...

Ce ne sont là que d'extraits choisis au hasard parmi les pages denses du roman d'Edith Wharton, "Chez les heureux du monde" ou "The house of mirth" dans sa version originale, d'infimes morceaux d'une oeuvre dont s'exhalent mille et un parfums, du plus raffiné, poudré au plus incommodant, puant.

 J'avais d'Edith Wharton un souvenir brumeux, provenant d'une première année de fac d'anglais, l'étude d'Ethan Frome. Je ne me souviens pas de grand chose mais tout de même du plaisir causé par cette lecture obligatoire.

Lily Bart est une héroïne étrange en ce sens que l'on ne l'aime ni ne la déteste, qu'elle est formidablement et affreusement humaine, en relief, vivante entre ces pages. Ces contradictions, sa superficialité, sa vanité et son sens moral tisse le squelette de la banale complexité qui définit l'être humain.

Edith Wharton dépeint avec merveille la société new yorkaise du début du XXème siècle. Loin d'être une experte en la matière, je prétends pourtant percevoir combien l'auteur réussit avec un indiscutable talent à donner vie à l'environnement comme au personnage.


Et la réussite de l'oeuvre ne s'arrête pas là. Au-delà de bâtir cette réalité palpable pour le lecteur, même en 2010, la netteté des contours et des contrastes de la vie de l'époque et des figures fortes de héros empêtrés dans de lourds carcans, Edith Wharton insuffle une poésie extrêmement raffinée à son récit. La valse lente de Lily, Selden, Gerty Farish, des Trenor, de Rosedale nous entraîne sans discussion possible avec eux et serre bien souvent le coeur.